L'aventure d'un jardin thérapeutique

Pense à un moment que tu as vécu, où tu as su maintenir une posture de coopération malgré un contexte difficile, seul.e ou avec ton équipe , où cette expérience a été un succès de ton point de vue et t'as rendu.e confiant.e dans la force de la coopération. Comment c'était ? Raconte-nous....

La création d'un jardin thérapeutique. Ca a commencé par des expériences dans un collectif qui s'appelle l'Essentiel, créé par Géraldine Schmitt, point ressourçant, qui a fait vivre une nouvelle manière d'être en groupe pour échanger, être créatif parce qu'à l'hôpital, tout était en tension, très vertical.
Je décide de créer ce jardin, et je commence par observer puis je crée un compost. Je théâtralise beaucoup cet investissement : je mets des bottes, un vieux jean etc... sans trop savoir pourquoi mais je le fais. Les collègues s'interrogent et je leur explique.
Je ne cherche pas à convaincre mais je fais. La secrétaire me dit : "tu peux pas savoir comme ça me fait du bien quand je te vois dans le jardin".
Je me dis, il se passe quelque chose, et donc avec la stagiaire Psychologue Paulina, on a échangé pour concevoir ce projet et avec l'hôpital a signé une convention avec l'Université pour cadrer cette 2ème année de stage au CMP.
Une fois le projet écrit, on le présente à l'équipe. On le fait dehors, debout, en cercle. Dans ce cercle, il y a les médecins de l'unité et la cheffe de service qui sont là malgré le fait qu'elles soient en conflit ouvert.
Tout le monde dans l'équipe sait que je fais des expériences en IC parce que j'en parle. J'ai vécu le fait que faire et être est beaucoup plus efficient que juste en parler.
Ces outils m'ont amené à réfléchir profondément à ma manière d'être en relation et de communiquer.

Sans fausse modestie, quels sont les talents, compétences, qualités que tu as mis en jeu pour que ce succès soit possible ? La conviction, une forte motivation, une joie à le faire et une humilité.
J'étais convaincue parce que je m'appuyais sur le Nous extérieur du collectif, il était intériorisé. Quand je faisais ça, ce collectif était avec moi. Une personne du collectif, Vincent, paysagiste est venue pour nommer toutes les espèces de plantes, arbres et arbuses du jardin de l'unité de soins.
Je suis d'une nature assez joueuse, créative, donc ça a ouvert encore quelques chose.
J'indiquais sans trop raconter mais je faisais. Au départ, on m'a pris un peu pour une folle, mais comme ça s'est écrit, structuré avec l'aide de la stagiaire psychologue et une étudiante en architecture qui a fait un super flyer.
J'étais comme messagère de quelque chose que je commençais à comprendre, qui me transformait profondément. Quelqu'un m'a dit : J'ai "ouvert une brèche dans la cage de l'institution qui devient totalisante dans son fonctionnement".
C'était un souffle, comme une nécessité pour l'équipe, pour les patients.
Quels éléments essentiels (facteurs externes, apports) ont été soutenant pour toi et ton équipe dans cette aventure ? Ce collectif était très présent, Avec Paulina, on a rencontré une psychologue qui a créé un jardin thérapeutique, le jardinier salarié de l'hopital, un plombier du service technique de l'hopital, graffeur semi professionnel, ok pour partager du graff avec les jeunes dans le jardin. Une collègue psychologue, Sandra, et un nouveau stagiaire psychologue, Kevin, ont accepté d'encadrer le projet avec moi et nous avons accueilli de nombreux adolescents.
Des lectures. Gilles Clément était aussi un fil conducteur, il dit que le jardin est une question politique.
Mon papa, vieillissant, qui a toujours beaucoup jardiné, près de la terre, donc des temps d'échange avec lui. Et ma soeur, très écolo, qui m'ont donné des graines, des plants.
La validation de notre responsable d'unité qui l'a présenté en CME, de la cheffe de service et la direction pour que ce projet soit accepté.
Ca a décloisonné, on a travaillé avec des salariés non soignants.
Si c'était à refaire, quels seraient tes 3 souhaits pour que ta posture de coopération soit encore plus forte et bénéfique pour le projet - J'aimerais qu'il y ait quelqu'un vraiment formé à l'IC et à la facilitation qui vienne dans l'équipe pour faire découvrir comment ça fonctionne. J'ai transmis un formation (Art of Hosting) qui pourrait être faite par les médecins et les responsables d'unité. Le chef de service et une responsable d'unité ont demandé des informations.
- Si je reste dans cet hôpital et que je crée un projet, j'aimerais créer une alliance avec un tiers qui s'occupe de la facilitation. Quand je me présente en tant que soignante, je présente aussi cet angle là
- Qu'il y aie plus de soignants qui s'intéressent à ça. Les médecins sont encore décisionnaires. J'adorerais travailler avec un médecin qui a cette double casquette.
Comment souhaites-tu signer ta contribution ? (Nom ? Prenom ? Structure ? Anonyme ?) Isabelle B. Psychologue clinicienne - CMP Ados en IdF
Qui a permis que tu te retrouves ici ? Valérie Normand