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Hélène Vuong, membre de Solucracy, a déployé la méthode pour réaliser l’analyse des besoins sociaux recommandé par la CAF dans la démarche d'écriture de la candidature du tiers-lieu Le K-Rabo pour la labellisation “Espace de vie sociale”.

Le K-Rabo est localisé sur Putanges-le-Lac, une commune nouvelle de 2159 habitants (965 ménages) avec une densité démographique assez faible.

Voici les mots d’Hélène sur le projet :

Pourquoi avoir utilisé la méthode pour ce projet ?

C'était évident pour moi, quand Carine, l'une des porteurs du K-Rabo, m'a parlé de la relance du diagnostic social, j'ai tout de suite pensé à la méthode Solucracy. Le porte à porte était déjà prévu et c'était pour moi évident et le meilleur moyen pour aller rencontrer les gens : ceux qui connaissent et ne connaissent pas le lieu, ceux qui soutiennent et ne fréquentent pas le projet de près, aller collecter leurs besoins et potentiellement y répondre à travers Le K-Rabo. Le caractère humain et les valeurs des collectifs du K-Rabo et de Solucracy m'ont motivés à joindre les deux bouts.

Quelle était l’intention ?

Aller à la rencontre des habitants, du voisinage, et comprendre leurs besoins d'ordre social en présentant les projets du K-Rabo.

Etape 1

Raconte moi

Ça a commencé par la constitution d'une équipe de bénévoles qui aiderait sur l'une des 3 phases ou tout le long du projet : contact des structures locales ; distribution des questionnaires accroches-porte ; collecte des questionnaires et rencontre des voisins. 

J'ai commencé par faire appel au réseau des bénévoles volontaires au tout début du projet en 2020. Je les ai sollicité individuellement et j'ai fait des appels collectifs. On a organisé des réunions d'information pour expliquer et sensibiliser les sociétaires de la SCIC K-Rabo également : la récompense était le label Espace de Vie Sociale et des aides techniques et financières de la CAF de l'Orne pour notamment embaucher une nouvelle personne au sein de l'équipe, aide non négligeable pour le K-Rabo à ce stade. 

Nous avons aussi sollicité les structures locales directement afin de solliciter leur réseau en soutien. On a fini par rassembler 29 bénévoles, avec une échéance de la CAF de 2 mois au total pour travailler sur le projet, court à mon sens, ce qui nous a forcés à faire ça dans un rythme soutenu. 

Comment t’es tu sentie après cette étape ?

Un peu désespérée, c'était très dur de mobiliser des gens autour d'un tel projet, qui plus est, qu'ils n'ont pas initié. Les bénévoles étaient déjà sollicités par ailleurs, et le réseau dans lequel nous avons sollicité des gens sont tous connectés à des projets très actifs, les gens n'avaient plus le temps ou pas envie. Il y avait aussi une fatigue ambiante de fin d'année, on attendait et préparait les fêtes de Noël ! 

À refaire, je passerai plus de temps à informer et solliciter de l'aide personnellement, peut-être moins énergivore que de lancer une bouteille à la mer. 

Combien de personnes as-tu pu recruter ?

29 personnes avec des bénévoles très impliqués qui sont présents et en aide sur déjà plein d'autres activités. 

Qu’est-ce qui a bien fonctionné ?

Le projet dans le global a eu de l'écho, les temps collectifs ont très bien fonctionné. Aller rencontrer les gens directement a permis de mobiliser. Les retours ont remonté des frustrations de ne pas avoir pu rencontrer et aller parler à encore plus de gens !  

Aussi, les documents modèles de Solucracy et le soutien du collectif ont été cruciaux. J'ai pu les utiliser, les ajuster, je savais où j'allais, tout ça aussi grâce au soutien de Yannick de Solucracy sur ce projet. Les réunions collectives de préparation m'ont carrément mâché le travail.

Porter la méthodo Solucracy sur le terrain m'a fait me sentir plus légitime et plus ancrée dans le collectif. 

Qu’est qui n’a pas fonctionné ?

Les imprévus. 

Ca a été trop court comme délai pour prévenir et réunir les gens, j'aurais organisé les temps collectifs différemment, c'était sur des temps de vacances donc pas idéal.

On a pu joindre les structures mais on ne les a pas re-sollicitées parce qu'ils avaient l'air déjà bien occupés alors que ça aurait pu nous aider à créer un réseau plus resserré dans le projet. 

3 souhaits pour que ça se passe encore mieux la prochaine fois ?

  • Prendre le temps d'aller rencontrer les gens directement pour créer l'adhésion et le soutien car un email ne suffit pas
  • Laisser plus de temps pour que les gens découvrent le projet : permanence, présentation pour se faire repérer, que le bouche à oreille ait le temps de faire son effet

Autre chose à dire sur cette étape ?

Il est essentiel que le porte à porte émane de quelqu'un de local et de permettre les rencontres sur 2 mois pour que les gens aient le temps de se raccrocher au projet

Etape 2

Raconte moi

On a mis les questionnaires dans les boîtes aux lettres, pas sur les portes, certains sont passés inaperçus, comme des prospectus promotionnels. 

C'était très intéressant, l’équipe se demandait pourquoi on avait fait la distribution car beaucoup n'avaient pas vu le petit papier où l'avait jeté.

A l’inverse, quelques personnes âgées nous ont dit : "On vous attendait !"

C'est super de découvrir le territoire à travers les boites aux lettres, la familiarisation des hameaux et des familles qui y habitent. Des membres de l’équipe ont dit qu'ils avaient rencontré des voisins qu’ils n’avaient jamais rencontrés. 

D'autres ont trouvé dur de rentrer chez les gens comme ça.

Dans la globalité, ça a créé une joie incroyable. Beaucoup ont été touchés d'être invité à boire le café, dans une intimité inconnue et ont trouvé ça trop court. C'est assez indescriptible, et un honneur d'avoir pu participer à ça.

Comment t’es tu sentie après cette étape ?

Hyper fière et informée. Très étonnée par les partages, j'ai l'impression d'avoir rencontré une partie du territoire que j'aurais jamais rencontrée autrement. Beaucoup de réponses d'agriculteurs, de retraités, de familles qui ne côtoient pas des tiers-lieux ou des marchés que je fréquente car ils manquent de temps ou n'ont pas de moyens de locomotion. Je suis curieuse d'en savoir plus, j'ai envie de faire plus de porte à porte. Je vois encore plus l'importance de la consultation publique et citoyenne et de leur implication dans les prises de décisions pour ceux qui le souhaitent. Je vois l'importance d'intégrer cette diversité d'intérêts et d'idées dans un tel processus certes plus long mais plus démocratiques.

Combien de temps ça vous a pris ?

28h30 pour le porte à porte seulement, pour plus de 1000 accroches-porte, 164 réponses reçues sur papier, en direct ou en ligne tout en considérant qu'on n'a pu que 35 à 40% du territoire. 

Qu’est-ce qui a bien fonctionné ?

C'était fluide et convivial sur les phases de distribution et le porte à porte. On fait des choses qu'on sait déjà faire : parler aux gens et glisser des prospectus dans les boîtes aux lettres. en binôme, ce qui nous permet de rencontrer quelqu'un de nouveau. 

La formation avant le porte à porte était apparemment utile, les débriefings ont permis l'expression des impressions et ressentis. Les retours ont fait remonter que les bénévoles en binôme ont passé un super moment à chaque fois. 

Qu’est qui n’a pas fonctionné ?

La carte google pour trouver les maisons, j’ai dû m'adapter au dernier moment. Je me suis rendue compte que chaque personne a une appréhension des directions et des cartes différentes, je serais plus attentive à ce point la prochaine fois. 

Trop court en temps et pas assez d'énergie pour couvrir la totalité du territoire. 

Les questionnaires auraient mérité d'être un vrai accroche porte, ça aurait surement mieux marché ! 

Les questions posées en face à face étaient plus compréhensibles car 2 questions se ressemblaient sensiblement dans la lecture.

3 souhaits pour que ça se passe encore mieux la prochaine fois ?

  • Préparer autrement les cartes pour faciliter leur lecture 
  • Prévoir un temps plus long pour permettre de rencontrer plus d'habitants dont des jeunes (arrêts de bus, écoles) tout en prévoyant un budget en conséquence
  • S'assurer d'un appui concret des élus et des collectivités afin d'avoir leurs retours sur chaque étape contrairement à avoir un soutien distant sur le projet 
1ère page synthèse

Conclusion

La création de liens et l'écoute, c'est la base pour créer ensemble le territoire de demain. La coopération ne peut se créer sans rencontre, c'est clé et essentiel de réinjecter dans notre culture collective des échanges sans frontière, d'aller vers l'autre avec ouverture plutôt que d'attendre que l'autre viennent vers nous.  

Le porte à porte était une expérience inattendue, je recommanderais à toute personne de le faire une fois au sein de sa commune car dans le contexte social actuel, ça aide à casser des barrières, les préjugés, les peurs, les aprioris et les jugements qu'on peut avoir de loin parfois. On ne peut que créer des liens même si on rencontre des idées et des visions différentes des nôtres. 

C'est une porte d'entrée pour entrevoir la vision des uns et des autres, créer de nouveaux ponts entre nous afin de créer des communs qui nous correspondent vraiment. 

Les gens vous invitent à passer le pas de leur porte, à boire un café et s'entrouvre à ce moment une nouvelle manière de voir leur monde et donc le nôtre. 

Je suis vraiment fière d'avoir pu l'organiser au sein du K-Rabo et sur ma commune

Hélène Vuong